S'informer
Élève faisant une tâche mathématique Élève faisant une tâche mathématique
Articles

Résoudre des problèmes : réduire les mots et les maux !

Secondaire

Introduction

Comme enseignant de mathématiques, nous avons tous, un jour ou l’autre, utilisé ou même conçu une situation de résolution de problème contenant près de 4 pages de texte ! Est-ce que c’est nécessairement mauvais ? Non, mais cela place assurément certains élèves ayant des difficultés de lecture en situation problématique. 

Il est important de comprendre que parfois nous mettons nous-mêmes nos élèves en difficulté, et ce, sans même que ces difficultés soient du domaine des mathématiques. En anticipant les obstacles de lecture de nos élèves, nous pouvons rendre plus accessible la résolution de problèmes mathématiques. Voici quelques pistes de solution permettant de faciliter la résolution de problèmes pour nos élèves ayant des difficultés de lecture ou dont le français n’est pas la langue maternelle.

Résolution de problème + réduire le texte = moins de problèmes !

Sachant que nos élèves éprouvent des difficultés en lecture, il importe de simplifier les situations problèmes proposées, non pas au niveau des mathématiques, mais plutôt dans la structure des informations. Lorsque nous évaluons la compétence de nos élèves à résoudre un problème, nous n’évaluons pas leurs compétences à décoder l’information ou comprendre les inférences. 


Avant de remettre une situation problème aux élèves, nous devons nous assurer que l’information est réduite au minimum, juste assez pour comprendre le contexte et connaître les éléments pour la résoudre. Voici un exemple d’une courte situation problème qui aurait pu être remise à des élèves du 3e cycle du primaire ou même de 1re secondaire.

Le commerce de Sophie 1ère version

Sophie, qui était infirmière, doit réorienter sa carrière à la suite d’un déménagement. Elle se passionne pour la pâtisserie et aimerait ouvrir un commerce de petits gâteaux. Pour ce faire, elle doit louer un espace, acheter des instruments de cuisine et des ingrédients. Elle fait son budget pour les six premiers mois suivant l’ouverture de son commerce et doit considérer certains éléments. Sophie a choisi une boutique située dans le centre commercial de sa municipalité. Elle en fera la location au coût mensuel de 900 $, auquel s’ajoutent des frais d’entretien de 250 $ pour la même période. Le coût des ustensiles de cuisine est fixé à 477,60 $. Mensuellement, Sophie a besoin de se procurer 80 sacs de farine à 9,45 $ le sac, 288 œufs vendus 3,50 $ la douzaine, 52 portions de beurre sachant que 4 portions coûtent 4,95 $ et 25 sacs de sucre coûtant 5,05 $ le sac. Aide Sophie à déterminer la somme totale de ses dépenses pour les six premiers mois. Ne calcule pas les taxes.

Dans cette situation problème, bien que le contenu mathématique ne soit pas si complexe, il y a plusieurs informations superflues qui alourdissent inutilement le texte. L’information n’est pas divisée et l’utilisation de certains mots de vocabulaire plus difficiles n’est pas nécessaire, par exemple « mensuellement ». Aussi, certains éléments sont nommés de façon différente dans le texte, « espace » et « boutique » ou « instruments » et « ustensiles ». Ces pratiques sont à éviter, car elles nuisent grandement à nos élèves.

Définir clairement l’intention de lecture et les éléments importants de la situation

Dans les cours de français, les élèves sont appelés à définir, avant même de débuter la lecture d’un texte, l’intention de lecture en observant les images, les sous-titres, les éléments en gras, etc. Pourquoi ne pas en faire autant en mathématique ? Pour illustrer cette façon de faire, voici la même situation problème, mais dans un format différent.

Dans l’exemple Le commerce de Sophie 2e version, l’intention est clairement nommée au départ, contrairement à la première version où la question est indirecte sans point d’interrogation et se trouve à la fin du texte. De plus, les images indiquent ce dont il sera question dans la situation, les sous-titres identifient les éléments essentiels à tenir en compte et la structure des informations est épurée et mieux définie. En plus d’augmenter l’intérêt des élèves à réaliser la tâche, la deuxième version facilite grandement la lecture et la compréhension de ce qui est attendu dans cette situation problème.

Des questions sans mots ?

Élèves travaillant ensemble

L’utilisation de questions ayant très peu de mots, ou tout simplement pas du tout, est aussi très pertinente en mathématique. Des questions visuelles comme celles présentées sur le site Visual Patterns ou Estimation 180 sont à exploiter puisque, comme le texte y est pratiquement absent, nous pouvons donner aux élèves avec des difficultés de lecture ces problèmes mathématiques à résoudre sans leur nuire. Les tâches du type Les maths en 3 temps sont aussi pertinentes : non seulement la question est sous forme de vidéos, mais ce sont les élèves qui doivent déterminer la question et de quelles informations ils ont besoin pour y répondre.

Comme vous avez pu le constater, la résolution de problème en mathématiques peut apporter son lot de maux aux élèves, particulièrement auprès de ceux éprouvant des difficultés de lecture ou dont le français n’est pas la langue maternelle. En anticipant les difficultés ou les obstacles, comme enseignant nous pouvons, en tant qu’enseignants, amoindrir l’impact de ces lacunes sur le développement des compétences mathématiques de nos élèves. Parfois, il suffit de modifier un peu nos situations de résolution de problèmes pour aider nos élèves.

Auteur
Frédéric Ouellet
Directeur des services pédagogiques au Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, consultant en mathématiques et pédagogie numérique

Un peu plus sur l'auteur

Frédéric Ouellet a commencé sa carrière en éducation en 2000 comme enseignant de mathématiques, il a exercé tant au secteur public que privé. En 2012, il devient conseiller pédagogique en mathématiques et science au secondaire, ainsi que représentant Récit. En 2021, sa passion pour l’enseignement le pousse à retourner comme enseignant et technopédagogue au Collège Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Depuis 2023, il en est le directeur des services pédagogiques. S’impliquant auprès de la communauté mathématique depuis 2014, il a été président du GRMS, le Groupe des responsables en mathématiques au secondaire. Il est aussi l’adaptateur des ouvrages La classe collabo-réflexive en mathématiques et La corde à linge mathématique.

Merci à notre précieux partenaire