Introduction
L’erreur est souvent perçue négativement. Pourtant, elle peut devenir un tremplin efficace pour faire progresser les apprentissages. Analyser sa source permet de mieux ajuster les interventions et ainsi répondre adéquatement aux besoins des élèves dans leurs apprentissages. Le rôle de l’enseignant.e est donc d’anticiper ces obstacles, ces erreurs possibles afin de :
planifier, questionner et offrir de la rétroaction constructive aux élèves pour qu’ils progressent à partir de leurs erreurs ;
accompagner et guider les élèves dans le développement de stratégies efficaces face à leurs apprentissages.
Résolution de problème
Notre programme de mathématiques est basé sur les compétences à résoudre et à raisonner des problèmes. De plus, selon le Référentiel d’intervention en mathématique, les deux fondements à l’apprentissage des mathématiques sont de donner du sens (compréhension conceptuelle, flexibilité, fluidité) et de recourir à la résolution de problèmes variés. La clé est donc de permettre aux élèves d’explorer les concepts et les processus mathématiques (exemple : construction du concept d’aire) pour qu’ils discutent, raisonnent et développent des stratégies en résolution de problèmes. La classification des types d’erreurs en résolution de problème diffère d’une pédagogue à l’autre. La tendance est de les associer aux critères d’évaluation.
Les catégories
Voici plus en détail les trois catégories ciblées.
Les erreurs de compréhension sont visibles, entre autres, quand l’élève n’est pas en mesure de commencer la tâche ou qu’il tente une résolution qui n’est pas en lien avec celle-ci. La compréhension d’une tâche ne se limite pas à décortiquer un long texte en utilisant des stratégies de lecture. C’est principalement comprendre ce qui est demandé, utiliser des stratégies, sélectionner les concepts et les processus appropriés et entrevoir les étapes pour y parvenir. Il n’y a pas de recette unique puisque chaque problème apporte son lot de défis.
Astuces
Présenter des problèmes en groupe-classe ou en sous-groupe sans les résoudre pour discuter des stratégies. Internet et les maisons d’édition regorgent de problèmes à exploiter en classe.
Créer un plan de questionnement avec les élèves.
Présenter des problèmes sans nombres pour se concentrer sur les stratégies sans calculer.
Il peut s’agir d’une erreur due à une distraction (transcription d’un nombre), à un apprentissage inadéquat du concept (½ = 1,2) ou du processus (méthode pour additionner deux nombres ou isoler une variable). Ces concepts et processus sont inscrits dans le programme et dans la progression des apprentissages. Ces méprises demeurent fréquentes chez les élèves, puisque, en classe, l’accent est mis sur l’apprentissage de trucs (algorithmes, méthodes de calcul) sans les comprendre.
Souvent, les enseignants les utilisent en pensant aider les élèves et en donnant une fausse impression d’accélérer les apprentissages. Cependant, les recherches démontrent que l’importance doit être accordée à la compréhension conceptuelle et à la flexibilité pour les ancrer solidement. Pour un apprentissage efficace, les élèves ont besoin d’une diversité de moyens pour comprendre (discuter, réfléchir, manipuler, voir, mettre en contexte, confronter, comparer, s’exercer…) et ainsi, essayer, se tromper, réessayer et progresser.
Astuces
Éviter l’enseignement précoce des trucs mathématiques. L’utilisation de la didactique est essentielle pour anticiper les obstacles et pour mieux enseigner la compréhension conceptuelle (exemple : éléments de méthodes PFEQ, livres de Van De Walle ou Marian Small).
Souligner les erreurs d’application sans donner une note. Les élèves doivent apprendre à les retravailler afin d’apprendre.
Former des sous-groupes selon les difficultés rencontrées.
Avec une démarche claire et structurée, il est plus aisé pour l’élève de valider ses étapes afin d’y déceler ses erreurs. Cette catégorie englobe également les erreurs de symboles (< ou >), de conventions mathématiques (2x3 = 6 - 4 = 2 ou les unités de mesure) et de justification (vocabulaire inadéquat).
Astuces
Demander aux élèves individuellement de résoudre un problème à leur façon. Ensuite, interchanger les copies entre les élèves pour observer la démarche des autres afin de bonifier la leur. Finalement, entamer une discussion pour déterminer les éléments essentiels à mettre en place dans une démarche claire et complète (démarche #TORU).
Bonifier le plan de questionnement construit lors de la compréhension de la tâche pour valider la démarche de l’élève.
Présenter une démarche d’un problème qu’ils ont déjà résolu pour repérer les irrégularités en lien avec une démarche adoptée auparavant.
Demander aux élèves de justifier leur démarche oralement lors de discussions (causeries) mathématiques. Le développement de la justification doit être fait à l’oral avant l’écrit. Des routines (5-10 minutes par cours) engagent les élèves comme Quel est l’intrus ? Ou 180 estimations afin de justifier leur choix ou leur estimation.
Conclusion
En résumé, il est possible de tirer profit des erreurs dans l’apprentissage. Celles-ci peuvent être anticipées dans la planification et exploitées stratégiquement lors de leurs émergences en classe. L’analyse de l’erreur selon les trois grandes catégories permet une intervention plus ciblée dans le but d’aider l’élève à progresser. Il convient de rappeler l’importance de la résolution de problèmes et de donner du sens aux apprentissages pour utiliser pleinement ces erreurs. D’autres sources d’erreurs en mathématiques auraient pu être abordées comme la gestion des émotions, la surcharge cognitive, la motricité fine et les capacités langagières. Plutôt que de craindre les erreurs, cultivons l’apprentissage qui germe de celles-ci pour progresser.
Merci à Esther Veilleux, conseillère pédagogique en mathématique, pour sa grande contribution à cet article.
Pour aller plus loin
L’erreur en mathématique au secondaire : un levier pour l’apprentissage. Ministère de l’Éducation du Québec. (2002)
Référentiel d'intervention en mathématique. Ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur du Québec. (2019)
Les types de raisonnement en mathématique.
L’erreur, un outil pour enseigner. Astolfi (2017)
Les trucs mathématiques au primaire : et si on leur donnait du sens! Adihou et Marchand (2018)
Apprentissage par la résolution de problèmes. Theis et Gagnon (2013)
Enseigner la résolution de problèmes. Picard (2018)
Toutes ces erreurs sont bonnes. Proulx (2021)
L'enseignement des mathématiques, Tome 3. Van de Walle et Lovin. (2008)
Un peu plus sur l'autrice
Biologiste de formation, Lysandre Berger sent l’appel de l’enseignement rapidement dans sa carrière, ce qui l’amène à bifurquer vers l’enseignement des mathématiques au secondaire. Pédagogue dans l’âme, elle rédige un mémoire de maîtrise en didactique de la mathématique concernant la vision des enseignants de 2e secondaire sur la complexité des problèmes écrits en algèbre. Elle a travaillé au primaire, au secondaire et au collégial. Conseillère pédagogique depuis plus de 10 ans dans la région de Québec, l’apprentissage des mathématiques sous toutes ses formes est sa passion.