Est-ce que l’expression des émotions est différente à l’adolescence?
Introduction
L’adolescence est une période qui comporte d’importants changements, qu’ils soient biologiques, physiques, cognitifs ou émotionnels.
Développement cérébral et adolescence
Il faut du temps au cerveau pour se développer; on considère que le cerveau atteint sa maturité vers l’âge de 20 ans. À l’adolescence, le lobe frontal est encore immature, alors qu’on observe une surexcitation du lobe limbique. Une des fonctions du lobe frontal est de ne pas être submergé par les émotions. Il a donc un rôle d’autorégulation. Le lobe limbique permet de reconnaitre et ressentir les émotions. Ainsi, le fait que ces deux structures ne se développent pas en même temps dans le cerveau de l’adolescent va créer un déséquilibre. En effet, un adolescent va ressentir les émotions plus intensément qu’un adulte puisque son lobe frontal ne lui permettra pas de contrôler son lobe limbique efficacement. Par exemple, l’adolescent a plus de difficultés à contrôler son impulsivité. Certaines études montrent même que le système limbique de l’adolescent s’active en l’absence de situation émotionnelle.
Influence des pairs à l’adolescence
Le lobe limbique est un système qui augmente le plaisir, donc la récompense associée à la prise de risque. Chez l’adolescent, il en résulte une augmentation de la prise de risque en présence de ses pairs et les conséquences à long terme d’une action en seraient balayées. Un risque, c’est la probabilité d’obtenir une conséquence négative quand le cerveau fait un choix. La prise de risque chez l’adolescent serait plus élevée que chez l’adulte seulement en situation sociale. Autrement dit, l’adolescent prend des risques seulement en présence de ses pairs pour obtenir une « récompense » sociale. Les études montrent qu’en présence de ses pairs, le système limbique de l’adolescent est modifié et le rend plus sensible à la récompense, ce qui peut le pousser à prendre plus de risques.
Les émotions dites « sociales » comme l’envie, la culpabilité, la honte ou la jalousie seraient plus fortement ressenties chez l’adolescent que chez l’adulte. On comprend alors pourquoi l’adolescent aura tendance à se comparer aux autres.
Prise de décision et adolescence
L’interaction entre le cortex préfrontal et limbique guide la prise de décision. Cependant, chez l’adolescent, le lobe limbique (donc les émotions) « pèserait » plus fort dans la balance et les adolescents ne disposent pas des capacités cognitives optimales pour analyser les options qui s’offrent à eux pour prendre de bonnes décisions. Ainsi, certaines de leurs décisions peuvent paraitre irraisonnées pour l’adulte, mais en réalité, les adolescents se laissent guider par leur système limbique.
Régulation émotionnelle
Il ne s’agit pas de ne plus ressentir ses émotions, mais d’apprendre à les ressentir et à les exprimer de façon optimale. Une façon de réguler les émotions de l’adolescent est de lui proposer une réévaluation de la situation. Cette méthode permet de relativiser la situation qui a provoqué chez l’adolescent une forte émotion. La réévaluation permet de diminuer l’activité du lobe limbique, donc de ressentir l’émotion avec moins d’intensité. Il n’est pas facile de réguler l’activation de son système émotionnel pour un adolescent, mais si l’enseignant lui donne des pistes de solution, il s’améliorera.
Régulation émotionnelle et apprentissage
Il est important de connaitre des techniques de régulation émotionnelle, car les émotions peuvent être un frein dans les apprentissages de l’adolescent. En effet, une émotion ressentie fortement peut prendre le dessus et empêcher le jeune de se concentrer sur la tâche à faire. Comprendre l’émotion vécue, l’identifier et la verbaliser est déjà une intervention.
Un peu plus sur l'autrice
Marjolaine est détentrice d’un doctorat en neuropsychologie depuis 2011. Elle est passionnée par les neurosciences et plus particulièrement par la neuroéducation. Ainsi, son objectif professionnel est de rendre accessibles les données de la littérature scientifique afin d’aider les jeunes à utiliser de bonnes stratégies d’apprentissage.