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Bonifier ses pratiques évaluatives pour véritablement rendre service aux élèves

Secondaire

Introduction

Dans le monde de l’éducation, l’évaluation représente souvent un vrai casse-tête pour les enseignants. Comment obtenir un portrait juste de nos élèves sans nous retrouver emportés par un flot incessant de tests et de corrections? De plus, modifier nos méthodes peut s’avérer déstabilisant. Découvrez ici des façons d’enrichir vos pratiques évaluatives sans pour autant éliminer tout ce que vous faites déjà. Le changement, un pas à la fois!

Retour à la case départ : pour qui et pourquoi évalue-t-on?

L’évaluation est pour l’élève.

Elle devrait être une « photo » de son niveau actuel, un indicateur de ses forces et ses défis, un outil pour l’aider à progresser. Elle ne devrait pas être la finalité de ses apprentissages. Oui, elle est également un outil pour les enseignants, mais pas uniquement pour « faire les bulletins » ou pour « publier la note sur le portail ». On l’utilise pour poser un regard sur l’ensemble de notre groupe, pour donner de la rétroaction et pour réorienter le contenu de nos prochains cours pour mieux répondre aux besoins de nos élèves. Elle devrait leur permettre de démontrer de la meilleure façon possible leurs compétences.

Imaginez que vous suivez un cours pour apprendre à faire de la planche à neige. Lors de votre premier essai, vous parvenez à glisser le long de la piste sur une distance de 11 mètres avant de tomber. Au deuxième, vous parcourez 25 mètres. Au troisième, 41 mètres. C’est à votre cinquième essai que vous triomphez en atteignant le bas de la piste sans la moindre hésitation. Vous savez maintenant faire de la planche à neige! Votre professeur vous dit que, toutefois, il vous donne la note de 68 % parce que vous êtes tombés 4 fois avant de maitriser ce nouveau sport.

Est-ce que vos premiers essais de planche à neige représentaient réellement vos capacités actuelles? Non, mais ils sont pris en considération dans votre « note » finale, devant refléter votre niveau de compétence. De nombreuses écoles se retrouvent dans une situation similaire. On cumule plusieurs évaluations sur une période donnée et on y attribue une note, qui sera conservée pour les bulletins. À l’étape suivante, on recommence à gravir la montagne avec ses groupes.

Au moment de faire une évaluation… 

  • Est-ce que les élèves avaient eu le temps d’affirmer leurs apprentissages? 

  • Avions-nous eu le temps de faire un retour sur les précédentes évaluations?

  • Avions-nous revu les notions qui semblaient déficitaires pour nos élèves?

  • Est-ce que les élèves avaient eu l’occasion de s’exercer? 

La fameuse photo que nous prenons lors de ces moments… Est-elle réellement représentative ou serait-elle un peu floue? Réfléchissons à des moyens qui pourront nous aider à bonifier nos pratiques évaluatives afin de véritablement rendre service à nos élèves.

Se baser sur la triangulation des preuves d’apprentissage

Naturellement, une première piste à explorer est la triangulation des preuves. Quand on porte un jugement professionnel sur les apprentissages d’un élève, il est crucial d’équilibrer et de varier les preuves d’apprentissage. Cela permet de respecter les différents styles d’apprentissage, la diversité des élèves et les forces et défis de chacun. Il n’est pas nécessaire de toujours utiliser des questionnaires écrits pour faire l’évaluation de vos élèves. Vous pouvez utiliser des conversations de groupe, des présentations orales, une maquette ou même un document interactif. En ayant cela en tête, vous pouvez, dans un premier temps, envisager autrement la planification de vos évaluations avec vos collègues de matière.

Faire plus de place aux évaluations formatives

Pour laisser le temps aux élèves d’affirmer et de construire leurs apprentissages, on fait plus de place aux évaluations formatives. En faisant cela, on ralentit le rythme et on peut offrir aux élèves de multiples occasions pour s’améliorer. L’objectif n’est pas de comptabiliser ces évaluations, mais de planifier des moments où les élèves pourront exercer leurs compétences et recevoir de la rétroaction. Cette forme d’évaluation-soutien à l’apprentissage fait partie des plus grands facteurs favorisant l’apprentissage sur le long terme et de manière autonome (Hattie, 2012). Puisque le but n’est pas de les noter en vue du fameux bulletin, les élèves peuvent essayer de nouvelles stratégies sans craindre que cela les pénalise et ils comprennent qu’ils ont droit à l’erreur. Au fil de l’étape, l’enseignant peut quand même voir quels sont les acquis et les défis de l’élève. Finalement, l’évaluation qui « compte » sera un véritable portrait des compétences de l’élève, appuyée par toutes les traces récoltées précédemment!


Utiliser davantage l’autoévaluation

On considère parfois trop peu l’autoévaluation dans nos pratiques évaluatives. Procéder à une autoévaluation, c’est un exercice de métacognition. Il faut être capable de prendre du recul par rapport à une tâche. L’élève pose lui aussi un regard critique sur son cheminement, ses acquis, ses forces et ses défis, dans le but de s’ajuster. Avez-vous remarqué que je ne mentionne pas la note? Et oui, l’autoévaluation ne devrait pas se résumer à la note que l’élève se serait donnée! Le but, c’est de faire une réflexion personnelle quant à ses habiletés et ses défis pour ensuite réfléchir à des moyens pour progresser. 

Quand un élève apprend à identifier les stratégies nécessaires pour avancer dans son apprentissage de manière autonome, il développe une capacité d’autorégulation. Cette compétence lui permet de décider s’il doit continuer, ajuster ou abandonner une stratégie après réflexion (St-Pierre, 2004). L’autoévaluation est le point de départ essentiel pour acquérir cette capacité.

L’autoévaluation et l’autorégulation sont favorables aux apprentissages parce que l’élève peut utiliser ces compétences non seulement après les examens, mais aussi pendant ceux-ci. Il apprend à surveiller lui-même sa progression et à être actif dans son apprentissage. Lorsqu’il fait face à une difficulté, il peut lui-même réfléchir à ce qu’il fait et envisager d’autres solutions ou stratégies. En d’autres termes, cette responsabilité, qui revient bien souvent à l’enseignant, est maintenant partagée avec l’élève.

Conclusion

Les notes sont familières et rassurantes, mais elles ne reflètent pas pleinement le processus d’apprentissage. Elles omettent de mettre en lumière les forces et les défis spécifiques de chaque élève et ne fournissent pas de directives sur la manière de mieux soutenir le développement des apprentissages. Comme le souligne Butera (2011), les notes servent principalement à comparer les performances des élèves. Bien que nous soyons conscients que ces notes ne sont pas l’outil d’évaluation le plus représentatif, nous nous retrouvons souvent contraints de les utiliser. Néanmoins, il est toujours possible d’améliorer vos méthodes d’évaluation pour obtenir une image plus fidèle des capacités de vos élèves. Bien que le changement de pratiques puisse être déstabilisant, il est essentiel pour une évaluation plus précise et bénéfique!

Pour aller plus loin

Références bibliographiques

Butera, F. (2011). La menace des notes. Dans F. Butera, C. Buchs et C. Darnon (dir), L’évaluation, une menace?, p. 45-53.

Gouvernement du Québec. (2016). Programme de formation de l’école québécoise. Ministère de l'Éducation. https://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/PFEQ/prfrmsec1ercyclev2.pdf

Hattie, J. (2012). Visible learning for teachers: Maximizing impact on learning. Routledge.

Lachance, M. (2018, Novembre 27). Pour une réévaluation de l'évaluation. École Branchée. https://ecolebranchee.com/reevaluation-evaluation/


St-Pierre, L. (2004). L’habileté d’autoévaluation : pourquoi et comment la développer? Pédagogie collégiale, 18(1), 33-38.

Laurence Arcouette
Orthopédagogue à l'Institut TA

Un peu plus sur l'autrice

Laurence évolue depuis toujours dans le domaine de l’éducation, comme orthopédagogue ou enseignante en adaptation scolaire. Elle a travaillé auprès d’une multitude de clientèles, allant de la déficience intellectuelle à l’autisme, en passant par le Parcours de formation axée sur l’emploi et les défis d’apprentissage. Les apprenants en difficulté sont ceux qui lui tiennent le plus à cœur.

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