4 repères concrets pour des pratiques d’enseignement inclusives
Introduction
L’approche inclusive et durable repose sur un enseignement universel de qualité offert à tous les élèves, mais aussi sur les besoins du personnel enseignant pour éviter l’épuisement professionnel. Cet article vous présente quelques repères pour des pratiques d’enseignement inclusives et durables inspirées de la conférence de Mélanie Paré lors du 48e congrès de l’Institut TA, 2023.
De l’intégration à l’inclusion scolaire…
L’histoire de l’adaptation scolaire au Québec a connu une évolution significative, passant de l’intégration vers une approche plus inclusive. Cette transition n’a pas été sans défis et critiques. Initialement, l’intégration des élèves ayant des besoins spéciaux était souvent basée sur une conception déficitaire de la différence, influencée par le modèle médical. Ce modèle mettait l’accent sur le renforcement de la conception médicale, incluant le processus de diagnostic, l’étiquetage des élèves et la mise en place de plans d’intervention. Malheureusement, cette approche a souvent conduit à une stigmatisation des élèves et à une exclusion involontaire, en partie parce qu’un diagnostic préalable était nécessaire pour l’accès aux services pour les élèves ayant des besoins particuliers, tels que les élèves HDAA (élèves ayant des difficultés d’apprentissage, des troubles d’attention ou des troubles du spectre de l’autisme). Ainsi, bien que de nombreuses politiques inclusives aient été mises en place dans les systèmes scolaires, l’organisation des services ne va pas toujours dans le sens de l’inclusion souhaitée. Cette réalité souligne les défis persistants auxquels les écoles font face dans leur quête d’inclusivité.
Le modèle d’intervention individuelle, tel que le modèle RAI (Réponse à l’Intervention), a été introduit dans l’espoir de mieux répondre aux besoins des élèves. Cependant, ce modèle a parfois conduit à une accumulation d’adaptations et de services individualisés qui submergent les écoles et les enseignants, s’éloignant ainsi de l’approche inclusive recherchée. Cette suridentification des élèves ainsi que la multiplication des services individualisés ont souvent été contre-productives, écartant davantage les écoles de l’objectif d’une véritable inclusion.
L’approche inclusive se base sur un enseignement universel de qualité dès le palier 1, tout en prenant en compte les besoins du personnel enseignant pour prévenir l’épuisement professionnel. Cette perspective met donc de l’avant à la fois l’apprentissage durable et l’enseignement durable. Mélanie Paré a présenté ces idées lors du 48e congrès de l’Institut TA en 2023, offrant ainsi 4 repères pour des pratiques d’enseignement inclusives et durables.
Avant toute chose, doit-on vraiment adopter des pratiques pédagogiques inclusives?
Il est intéressant de constater que le référentiel de compétences professionnelles de la profession enseignante a bien évolué entre sa parution en 2001 et 2021. Si on observe le descriptif de la compétence #7, on remarque un petit renouveau.
* L’éducation inclusive réfère à l’élimination des obstacles à l’apprentissage pour accroître l’accès, la représentation, la participation et la réussite de tous les élèves. (Slee et Tait, 2022)
Par où commencer?
Bien entendu, la différenciation pédagogique et la conception universelle de l’apprentissage sont inévitablement liées à l’éducation inclusive, car elles visent à répondre aux besoins divers des élèves dans un environnement d’apprentissage. Plus concrètement, voici 4 repères qui pourraient vous éclairer :
1. Solliciter l’engagement des élèves
Encourager activement l’engagement des élèves est la pierre angulaire de l’éducation inclusive.
Offrir des occasions régulières de partage où les élèves peuvent échanger des idées, se donner des rétroactions constructives et enrichir leurs productions avant même l’intervention de l’enseignant.e est puissant.
Cette approche donne non seulement aux élèves une opportunité de s’approprier leur propre apprentissage, mais elle renforce également leur sentiment de compétence en les plaçant au cœur du processus d’amélioration continue. N’hésitez pas à placer vos élèves quotidiennement en situation de partage. Ces rétroactions, avant la finalité d’un travail ou d’une évaluation, permettent aux élèves de s’améliorer et donc, de ne pas voir le travail comme une montagne insurmontable. De plus, intégrer l’évaluation formative tout au long du processus d’apprentissage est inclusif. Après tout, on évalue dans le but que nos élèves apprennent, l’évaluation ne devrait pas être la finalité des apprentissages.
2. Miser sur la qualité de l’enseignement pour tous en classe
Au niveau 1 du modèle RAI, où se concentrent la plupart des interventions, il est primordial d’assurer une qualité d’enseignement accessible à tous les élèves.
Une pratique particulièrement efficace à mettre en œuvre est le coenseignement. Cette approche collaborative implique que deux enseignants, ou un duo enseignant.e et orthopédagogue, enseignent ensemble dans la même classe. Le coenseignement offre de nombreux avantages, notamment la diversification des méthodes pédagogiques, une attention plus individualisée aux besoins des élèves et une collaboration accrue entre les enseignants. Des pistes pratiques pour expérimenter le coenseignement sont proposées par Dubé, Dufour et Paviel (2019).
Voici d’autres pratiques pédagogiques de qualité.
3. Développer des normes partagées de pratiques inclusives
La création de normes partagées de pratiques inclusives est essentielle pour orienter nos interventions. Dans cette optique, le portrait de classe émerge comme un outil indispensable.
N’étant pas centré uniquement sur les élèves présentant des difficultés, le portrait de classe devrait refléter la diversité du groupe. Cet outil permet d’identifier de manière précise les défis rencontrés dans une compétence, facilitant ainsi la planification de l’enseignement. En effet, en générant des données par compétences, et non, un portrait représentant toutes les matières, le portrait de classe offre une vision détaillée des besoins des élèves. Cette approche collaborative, réalisée en duo ou en équipe, renforce l’inclusion et la réussite de tous. Il est essentiel de prendre le temps de recueillir, analyser et interpréter des données à différents moments de l’année.
4. Prioriser la mixité sociale et scolaire
Développer des relations positives en lien avec la diversité est essentiel pour favoriser la mixité sociale et scolaire. Cela peut être accompli en mettant en place des activités et des discussions qui célèbrent la diversité et encouragent le respect mutuel entre les élèves.
La mise en place d’activités telles que des journées culturelles où chaque élève peut partager ses traditions, ses coutumes ou encore sa neurodiversité permet de célébrer la richesse présente dans la classe. Ces initiatives encouragent le respect mutuel et la compréhension interculturelle, contribuant ainsi à créer un climat de confiance et d’ouverture où chacun se sent accueilli et respecté.
Pour aller plus loin
Ministère de l’Éducation. (2020) Référentiel de compétences professionnelles de la profession enseignante. (publication no ISBN978-2-550-88173-5-PDF)https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publications-adm/devenir-enseignant/referentiel_competences_professionnelles_profession_enseignante.pdf
Paré, Mélanie (2023). Les pratiques d’enseignement inclusives : repères de mise en œuvre [conférence]. 48e congrès de l’Institut des troubles d’apprentissage. Québec, Canada.
Paré, Mélanie (2022). Les petits gestes qui comptent pour une pédagogie plus inclusive. [Programme de formation] Institut des troubles d’apprentissage. Québec, Canada.
Un peu plus sur l'autrice
Détentrice d’un baccalauréat en adaptation scolaire et sociale, Marie-Philippe a travaillé en classes spécialisées ainsi qu’en orthopédagogie en milieux scolaires et privés. Présentement gestionnaire et créatrice de contenus à l’Institut des troubles d’apprentissage du Québec, elle satisfait sa curiosité professionnelle en collaborant avec des experts et pédagogues passionnés. Consultante pour l’entreprise ALEO VR, Marie-Philippe conçoit des jeux visant à rééduquer les troubles spécifiques en lecture grâce à la réalité virtuelle. Elle a également fondé l’entreprise ScolAide qui vise à outiller le plus grand nombre d’enseignants et d’élèves en difficulté par le biais de conférences, consultations, capsules vidéos et documentation en ligne.